Faisan de Colchide

ll y a quelques semaines je vous ai parlé d’un faisan de Colchide (Phasianus colchicus) que j’avais trouvé au bord d’une route. Après quelques semaines de préparation, il est enfin propre. Pour le nettoyage j’ai d’abord utilisé les mouches, mais comme la plupart des tissus étaient séchés j’ai testé une nouvelle méthode pour terminer cette étape : l’eau bouillante. Ça a duré plusieurs heures et ça a été plutôt efficace puisque vous pouvez voir le résultat brut sur les photos. Malheureusement j’y ai aussi perdu du cartilage costal, un fragment de crâne, les parties cornées (sur la mandibule et la plupart des étuis cornés des griffes), les secondes phalanges des ailes, les deux phalanges du premier doigts du membre inférieur droit et les pièces osseuses des anneaux sclérotiques se sont désolidarisées (c’est ce qui se trouve dans la boite en plastique). On pourrait les blanchir pour finaliser le processus mais on a décidé de garder cette couleur un peu terreuse, qui fait un peu moins plastique que le blanc parfait.

Maintenant que les os sont propres, on peut se pencher un peu plus sur ce qui a pu lui arriver.
Du côté droit, l’humérue (1), le coracoid (2), le fémur (3) et la furcula (4) sont brisés. Comme il a été découvert sur la route, je pense qu’il a été percuté du côté droit par une voiture, ce qui a causé sa mort.
Du côté gauche, la scapula (5) et le brechet (6) sont aussi brisés.
D’autres particularités sont notables. La dixième vertèbre cervicale a un trou sur sa partie droite (7). Le crâne était très fragile et en pièces (8).

Le bréchet est dévié (9), ça arrive régulièrement chez les tout jeunes, car ils ont encore les os assez malléables. La cause de cette déformation peut être alimentaire :
en cas de carences alimentaires (l’ossification est donc altéré au cours de la croissance) ; ou mécanique : lorsqu’il y a un déséquilibre au niveau du squelette par l’oisillon a une mauvaise position dans son nid (par exemple lorsqu’ils ont les pattes trop écartées sous le corps dans le nid : cela tire sur le squelette axial et déforme le bréchet).

On peut voir sur l’arrière de ses pattes des petites excroissances osseuses qu’on appelle ergot, qu’on trouvé chez les Galliformes et les Ansériformes. Il n’est pas toujours présent chez la femelle selon les espèces, mais en tout cas plus important chez le mâle. Chez le faisan, il n’est présent que chez les mâles.
On remarque aussi que les ailes sont très petites par rapport à la stature de cet oiseau. Les ailes sont courtes : cela implique qu’il ne peut pas tenir le vol sur de longues distances.
Par contre les pattes sont très grandes et très pauvres en muscles : en effet elles fonctionne avec un système de tendons, et ce ce qui rend les pattes puissantes, et permet d’ouvrir et fermer les griffes. Cette puissance lui permet de gratter activement la terre pour chercher sa nourriture. Les pattes ont quatre doigts, de 2, 3, 4 et 5 phalanges.
Le plumage ressemblait à celui d’une femelle (avec des couleurs plus éclatantes), la présence des ergots me fait dire qu’il s’agissait d’un mâle, mais les os sont matures. Les ornithologues considèrent qu’un oiseau est juvénile tant qu’il n’a pas atteint son plumage d’adulte et les os sont matures avant le plumage. Je reste donc sur mon idée qu’il s’agissait d’un jeune mâle pas loin de la maturité, qui s’est dont fait percuté par une voiture. Son jeune âge expliquerait aussi l’extrême fragilité du crâne.

On dirait du sang qui s’est accumulé et qui a séché dans une partie du bréchet.

5 réponses sur “Faisan de Colchide”

  1. Je suis scotchée, c’est fou cette analyse que tu fais des ossements comme ça ; c’est très impressionnant et l’étude des os doit être quelque chose d’extrêmement intéressant. Ça me fait penser que j’ai toujours pas trouvé le temps de déterrer ma poule ; j’ai entre autres peur d’abimer des os en creusant pour la retrouver, bien sûr ce n’est pas dramatique dans la mesure où je compte non pas remonter le squelette, mais en faire une sorte de mobile (un peu macabre, certes, mais je sens que tu n’en es pas choquée le moins du monde ^^)
    J’ai hâte de voir le faisan remis sur pattes !

  2. Tristelune > Je m’intéresse aux êtres vivants, leur évolution et histoire à toute échelle et leur architecture. Je trouve donc très intéressant qu’à partie de cette dernière, on puisse retrouver l’histoire d’un être vivant. En tout cas merci beaucoup pour ton commentaire (et c’est quand même plus facile d’avoir des informations en ayant vu l’animal presque "en chair" avant le squelette).
    Ne t’inquiète pas pour la poule, tant que tu n’y vas pas à la pioche ou à la pelle, ça devrait rouler.

  3. La classe. Y a pas très longtemps j’ai trouvé des ossements d’oiseaux, surement poule d’eau ou foulque je pense vu que c’était à côté d’un étang, et le crâne est trop gros pour que ce soit un moineau.
    Ca te tente pas de faire une vidéo pour voir le processus de décomposition grâce aux mouches ? Et tu fais comment exactement ? C’est dans une boîte ? J’y connais pas grand chose et ça m’intéresse vraiment ce genre de choses 🙂

  4. Mati > Pour la vidéo pourquoi pas. En ce qui concerne les méthodes que j’utilise, je peux te conseiller de lire ça : lafillerenne.free.fr/blog…
    Cette fois j’ai utilisé les mouches (je l’ai mis dans une bassine, recouverte vaguement d’un sac plastique et j’ai attendu un mois), puis j’ai fait bouillir les os contenant encore de la chair séchées, et là ça trempe dans de l’acétone pour le dégraissage.

  5. Ah ce plaisir de lire cet article!!
    Merci! J’ai appris des choses encore une fois!!
    Je pensais essayer la méthode des mouches pour nettoyer aussi, et je me suis commandé de l’alcool isopropylique à 70, je te dirai ce qu’il en est quand j’aurai reçu tout ça.

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