Je souhaite faire une mise à jour à la suite de la publication du témoignage posté il y a deux semaines sur le litige entre l’artiste Romain Gandolphe et moi-même.
Pour rappel, il s’agit d’un litige aussi bien sur un plan personnel que professionnel. Sur le plan professionnel, il concerne notamment deux de mes projets et ce que je considère comme une récupération de mes processus artistiques dans le domaine de la photographie argentique. Ces deux projets sont :
- Le projet photographique Arctic Circle sur lequel je travaille de façon épisodique depuis 2016. En janvier 2023, Romain a réalisé un travail que je considère similaire à ce projet, en prenant, d’après moi, un de mes livres comme point de départ. Nos travaux respectifs sont montrés dans un tableau comparatif dans l’article en question.
- Un design typographique que j’avais créé en 2021 pour le tatouer sur sa peau, que Romain a utilisé dans une de ses œuvres et ce, sans mon accord ou même m’en parler. Cette œuvre est aujourd’hui exposée dans un centre d’art à Toulouse.
Le plan personnel est peu évoqué, mais j’aborde tout de même la difficulté pour moi aujourd’hui de me sentir en sécurité dans les espaces lyonnais où j’ai l’habitude d’aller, même dans le contexte de mon travail.
Mon témoignage se termine sur le constat que pour moi, cela s’inscrit dans un contexte plus large où la reconnaissance de certain·e·s artistes par les institutions du milieu de l’art crée des enjeux de pouvoir.
À la suite de la publication de ce témoignage sur mon site, j’ai reçu énormément de soutien, à un point que je n’avais pas imaginé. Je tiens à remercier encore une fois les centaines de personnes qui ont réagi, que ce soit par messages, par commentaires ou par likes. Il y a eu plusieurs milliers de clics sur le site pour lire l’article, ce qui est aussi incroyable. C’est précieux de se sentir entendu·e et cru·e, surtout dans le cadre d’une expérience de vie qui m’a causé·e autant de dégâts. Cela m’a libéré·e d’un poids et je ne suis par exemple plus bloqué·e dans l’avancée de mon projet Arctic Circle. J’ai pu reprendre l’écriture d’un ouvrage commencé il y a deux ans sur le voyage mentionné de 2021.
En plus de cette écoute, je suis très touché·e que vous ayez été aussi nombreuxses à m’écrire pour me partager des expériences de vie et me dire que cela vous fait du bien de voir ce type de témoignages portés publiquement. La représentation est un pilier dans mon travail et je suis heureuxse de pouvoir continuer à porter ce type de valeur. L’artiste Ophélie Demurger a d’ailleurs publié son propre témoignage sur son compte Instagram.
Mais je suis aussi réellement horrifié·e du nombre que vous êtes à m’avoir écrit pour parler – avec vos propres termes – de relations très violentes, de vos ex qui vous harcèlent, de vos ex qui se sont appropriés ou ont signé vos travaux, d’autres artistes qui se sont appropriés vos travaux, etc. Et dans la grande majorité, ce sont des femmes et/ou personnes queer qui m’ont écrit pour parler de ces problèmes qu’iels ont vécu ou vivent encore, et ce, principalement face à des hommes. Et j’ai aussi été horrifié·e de constater que quasi aucun·e d’entre vous n’a obtenu justice dans son parcours.
La très grande majorité des personnes qui m’ont soutenu et/ou ont relayé mon témoignage sont aussi des femmes et/ou des personnes queers. Très peu d’hommes non queer ont exprimé du soutien ou m’ont écrit et cela me questionne toujours sur le pourquoi.
Je n’ai pas reçu de soutien des institutions : les Beaux-Arts de Lyon ont été interpelés par d’autres personnes et n’ont pas répondu. J’ai personnellement contacté le centre d’art qui expose l’œuvre de Romain contenant mon design typographique : le directeur m’a pour le moment répondu être déjà au courant et qu’il ne prendra pas de décision sans que la justice en prenne une. Quand on sait que ces procédures prennent des années et que l’exposition se termine en septembre … C’est très décevant et je ne comprends pas pourquoi mon consentement n’est pas écouté.
En résumé, les soutiens sont individuels, et principalement de femmes et/ou personnes queer, et non institutionnels. Cela correspond au constat que j’abordais déjà dans mon témoignage.
Et après ?
Dans un premier temps je souhaite que ce témoignage puisse continuer à vivre. Et comme je l’ai déjà mentionné, je vais donc poursuivre mes démarches jusqu’au tribunal, démarches qui vont malheureusement s’inscrivent sur plusieurs mois ou plusieurs années.